À PROPOS
Le rêve du Peintre
Si le modèle est imaginé ; la silhouette, elle, est l’ombre-portrait du peintre au travail. C’est l’instant fixé du rêve du peintre. Ici le réel et le subjectif se mêlent ; le modèle se fond ; les couches se succèdent, s’irisent, se colorent, se grainent ; la peinture devient peau.
Mais le peintre voudrait tout dire, tout partager. Aussi découpe-t-il sa toile et la fragmente-t-il en cinquante morceaux. Sorte de partage analytique donnant une autre dimension à chacun d’eux. Chaque fragment devient unique tout en participant de l’ensemble. En posséder un , c’est être en communication sensible avec les autres. Là, la peinture échappe au peintre ; elle pourrait se reconstituer de façon aléatoire au gré des choix des spectateurs et une oeuvre nouvelle apparaîtrait » universelle ».
Ainsi l’idée de morcellement m’a toujours préoccupé, comme dans la série de neuf toiles où la première est en réalité la dernière. En effet les diverses étapes de l’élaboration d’une toile m’ interroge. Etant de la génération de l’image, les notions de séries, de fragments, de mutiples, sont sources de création. Elles m’entrainent du support classique (la toile sur châssis) vers d’autres supports comme les paravents, les stores, les bannières (« hata » en japonnais).
En fait ce sont des rencontres qui émaillent mon travail de peintre. Rencontre simplement matérielle (stock de tissus d’ameublement) ; rencontre culturelle ; rencontre humaine ; « rencontre » encore avec Caspar David Friedrich…
Durant les années 80, j’ai réalisé des toiles-séquences qui préfiguraient l’idée d’étapes du travail en train de se faire. Un partage sensible du processus de création, un échange plus intime avec le spectateur s’établissait. Comme lors du morcellement-fabricateur de l’oeuvre, ces toiles fragmentées en séquences forment un tout.
Ici le partage entre le peintre et le spectateur devient unificateur.
Patrick LIPSKI
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